Artiste iconique de la nation innue, Florent Vollant s’apprête à sortir son sixième album Tshitatau, aux accents de folk et de country pour la journée nationale des langues autochtones le 31 mars. C’est depuis son Studio Makusham à Maliotenam et entouré de plusieurs artistes de sa communauté qu’il l’a enregistré. Le choix de la date de sortie revêt une signification symbolique pour lui… Artiste engagé, il n’a cessé de militer pour la préservation de sa culture et de sa langue, exprimant principalement son art en innu-aimun depuis 35 ans.
◆ Lumière intérieure
Florent Vollant est né en 1959 au Labrador parmi la communauté innu, Le terme Innu provient de leur langue, l’innu-aimun, et signifie « être humain ». Il a grandi à Maliotenam, une réserve située à l’est de Sept-Îles (région Côte-Nord, Québec). Sa carrière musicale débute dans les années quatre-vingt, et il joue un rôle essentiel dans la création du Festival Innu Nikamu, un événement annuel qui rassemble désormais de nombreux musiciens et chanteurs issus de différentes nations amérindiennes. Les premiers sons qui l’ont marqué sont ceux des chants traditionnels lors d’une célébration de chasse organisée par ses parents. Depuis lors, il décrit cette expérience comme une lumière intérieure qui l’anime : « C’est vers trois ou quatre ans que j’ai pris conscience du pouvoir de la musique. La musique va au-delà des mots, elle est spirituelle, innée je dirais. Pour la majorité des peuples, la musique fait partie des rituels, des prières, des célébrations. Chez les Innus, traditionnellement, elle sert de guide, par exemple, vers l’animal au moment de la chasse. On croit qu’elle arrive par le rêve et transmet un message. C’est une croyance très forte. Il faut être prêt à l’accueillir, être à l’écoute », avait-il déclaré en 2015 lors d’une interview à Radio Québec. Défenseur passionné de la nature et des rivières du Québec, il est nommé Artiste pour la Paix en 1994. Impliqué dans sa communauté de Maliotenam, il lance le projet du studio Makusham, un espace qui lui tient particulièrement à cœur, servant à la fois de studio professionnel et de centre de formation pour les jeunes musiciens autochtones. En 1999, Florent Vollant enregistre l’album de Noël Nipaiamianan en langue innue, avec des artistes comme Richard Séguin, Zachary Richard et Luce Dufault. Ce projet remporte un prix Juno, et la chanson Tshishe Manitu de cet album est une prière adressée au Grand Esprit ou à Dieu.
◆ Tshitatau, ça veut dire : vous étiez là
Parmi les personnes qui ont contribué à son nouvel album, on compte Kim Fontaine, qui a joué le rôle de musicien et d’ingénieur du son, ainsi que Mathieu McKenzie, le fils de Florent. Sam Pinette, membre du groupe Maten, Freddy Cluney du groupe Ninan, Scott-Pien Picard et Nelly Jourdain ont également participé. Une chorale d’enfants des écoles de la communauté innue de Uashat mak Maliotenam, dirigée par Mathilde Côté, a également contribué à cet album. En 2021, Florent Vollant a subi un AVC, entraînant une interruption de plusieurs mois dans la production de l’album alors qu’André Lachance et lui étaient déjà engagés dans le processus de création. Pendant sa convalescence, André a poursuivi son travail sur les textes et les mélodies. Le regretté Réjean Bouchard, musicien émérite et guitariste, qui avait précédemment assumé les rôles de directeur musical et de réalisateur sur plusieurs albums de Florent, a collaboré une dernière fois avec son ami pour ce nouvel opus. Le décès de Réjean en juillet 2023 a profondément attristé Florent. Il lui rend hommage et salue leur amitié de 25 ans ainsi que son talent et son accompagnement tout au long de leur parcours artistique. Les chansons de Tshitatau offrent des fragments de mémoire et d’anecdotes : « Je dédie cet album à tous celles et ceux que j’ai rencontrés, qui ont croisé ma route. Vous êtes avec moi, vous m’accompagnez chaque jour. Merci à toute l’équipe qui a rendu la création de cet album possible. Merci, André, pour ce partage. Et à toi mon ami Réjean, tu joues avec nous pour toujours. », a-t-il précisé sur le media québéquois Ma Côte-Nord.
L’album Tshitatau sera disponible dès le 29 mars sur les plateformes numériques.
« Comme je le disais, selon nos croyances, la musique arrive par le rêve. Le rêveur — musicien — est un rassembleur. Grâce à l’influence des rythmes, son défi est d’arriver à faire danser le makusham. Quand on y arrive, c’est grand, ça montre que les gens se sont bien amusés. Faire danser le makusham, unir les gens, c’est quelque chose ! Quand je finis un show et que le makusham était au rendez-vous, j’en veux encore ! », Florent Vollant
Jessica Baucher
+ Crédit photo en tête d’article : @Photoj Courtoisie
Florent a accordé une interview à Natives en 2021, à retrouver dans le numéro 4 de notre revue.
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